Accompagnant les parents dans l’éducation de leur(s) enfant(s), j’aborde habituellement le sujet des émotions de l’enfant et de leur prise en charge. Aujourd’hui, je consacre cet article à nos émotions en tant qu’adulte, et en particulier, à la colère.   Dans une démarche d’éducation bienveillante, je dis souvent qu’il faut d’abord être bienveillant avec soi-même avant de pouvoir l’être avec son enfant. Mais qu’est ce que cela veut-il dire concrètement ?   Comme il n’y a pas de réponse toute faite à cette question (sinon, ce serait trop facile !), je souhaitais prendre l’exemple de la colère, émotion que l’on ressent le plus souvent à l’égard des enfants. Pourquoi cela ? Parce que nos chers bambins nous renvoient, bien malgré eux, les blessures de notre enfance et reflètent le travail sur nous-mêmes qu’il nous reste à accomplir.   Alors attention, si vous ne souhaitez pas vous interroger sur le rôle que vous avez dans la responsabilité de VOS émotions, je vous invite à arrêter de lire cet article…   Dans le cas contraire, je vous félicite, car se poser des questions est déjà un pas vers le changement.  

La colère (envers l’enfant): cette émotion destructrice à travers laquelle tous nos réflexes d’éducation, qui découlent de l’enfance vécue, ressortent avec plus ou moins de violence.

Je vais donc développer la colère, cet énervement si intense qu’il peut nous faire hurler des choses que nous ne pensons pas, cette rage immense qui nous envahit et peut nous faire commettre des actes (parfois) irréparables…   “Il m’a poussé à bout” “C’est de sa faute aussi, il fallait qu’il m’écoute” “Il fait tout pour que je m’énerve” etc … NON, votre enfant n’est pas responsable de l’émotion que vous ressentez. Il peut seulement en être l’élément déclencheur. Pour preuve, tous les enfants font des expériences (appelées “bêtises”), seulement nous ne réagissons pas tous de la même manière. En cause ? L’éducation que nous avons reçue, les comportements que nos parents ou éducateurs ont eu avec nous. Prenons l’exemple d’un enfant qui renverse un verre : certains vont s’agacer, d’autres crier, d’autres encore prendre les choses simplement en expliquant à l’enfant d’être plus attentif. L’élément déclencheur est le même, mais notre réaction ne l’est pas.   Je suis responsable de mon émotion, mon enfant ne l’est pas pour moi.   Avoir cela en tête est une première chose. La seconde est qu’une émotion, donc la vôtre, exprime un besoin. L’émotion est un indicateur de la satisfaction de vos besoins propres. Mais je reviendrai sur cette notion, plus bas dans l’article. Sachant cela, comment réagir lorsque nous ressentons de la colère après un comportement d’un enfant ? 

 

1- Éloignez-vous

Si vous vous sentez au bord de l’explosion, éloignez-vous. Autant, je n’invite pas les parents à laisser seul leur enfant, surtout lorsqu’il est en pleine émotion (colère, chagrin, frustration…), autant il est beaucoup plus utile de prendre la vôtre en charge avant de vous occuper de votre enfant… sous peine de déraper, de vous mettre à crier et de perdre toute bienveillance en vous !   Je vous invite donc plutôt à verbaliser à votre enfant que vous prenez un peu de distance parce que VOUS en avez besoin (et non pas parce que vous lui demandez de réfléchir), que vous allez dans la pièce d’à côté mais que vous revenez très vite. Vous pouvez également mettre des mots sur ce que vous ressentez, par exemple : “Ce qui vient de se passer me met vraiment en colère, je sais que c’est difficile pour toi aussi. Pour que je puisse mieux t’accompagner, je vais juste m’éloigner un moment et je reviens dès que je serai plus calme. On pourra alors reparler de ce qui vient de se passer”.   Attention cependant à ne pas le culpabiliser : les phrases du type “TU me mets en colère” ou “Je vais m’éloigner parce que TU m’énerves” sont particulièrement accusatrices. Dans le cas présent, cela revient à reporter la responsabilité de votre émotion sur votre enfant qui se retrouve avec le poids de celle-ci, plus celui de la culpabilité. Veillez donc à utiliser le “JE”.   Vous éloigner vous permettra, concrètement de prendre du recul, et de laisser votre émotion passer (en moyenne une émotion dure 90 secondes). Car, en effet, si vous restez proche de votre enfant, les tensions ne s’apaiseront pas à moins d’avoir un super self-Control.  

 

2- Bougez, évacuez

Sachez que, lorsque vous êtes en colère, il y a quelque chose de physiologique qui se passe en vous (valable pour votre enfant également) : une montée d’énergie se produit dans le haut du corps -> les membres supérieurs, le buste, les épaules, la nuque… et même le visage lorsque vous devenez tout(e) rouge. Pour évacuez cette énergie, et donc l’émotion, il faut pouvoir la libérer physiquement. Pour cela, vous pouvez taper sur un coussin, crier (toujours dans un coussin 🙂 ), sauter sur place… bref, tout ce qui vous fera du bien sans faire de mal à l’autre. Une fois que vous l’avez libérée, vous pouvez revenir près de votre enfant.

Vous pensez peut-être que cela est ridicule (Il est vrai que cela fait bizarre la première fois !), mais je vous invite à essayer et je vous laisserai commenter l’article pour me dire ce que vous avez ressenti…

 

3- Respirez

Une fois que vous avez libéré votre colère, essayez de respirer. Cela parait anodin, c’est cependant une chose primordiale. En effet, en pleine émotion, il nous arrive fréquemment d’être en apnée. Pourtant, seule une respiration lente nous amène l’apaisement.

Prenez alors 3 grandes respirations minimum (inspiration et expiration) pour commencer à ressentir les bienfaits. En dehors des moments de crise, vous pouvez également vous appuyer sur la respiration pour gérer les conflits. En effet, il existe des exercices de respiration (par exemple, les exercices de cohérence cardiaque) qui permettent de mieux appréhender le quotidien et de diminuer le stress. Pratiquer des exercices de respiration régulièrement favorise la gestion des émotions.

Sachez que vous pouvez également faire ces exercices de respiration avec votre enfant pour lui apprendre à gérer ses émotions (oui parce que toutes les astuces que je vous donne dans cet article sont évidemment bonnes pour votre enfant… et plus il les aura mises en place tôt, plus ce sera simple pour lui lorsqu’il sera adulte !). S’il est petit, vous pouvez simplement lui proposer de s’allonger et de poser un bateau sur son ventre qu’il fera bouger au gré de ses respirations…

 

4- Identifier votre besoin non satisfait

Comme je l’ai déjà précisé dans mes précédents articles, une émotion est un indicateur de la satisfaction d’un besoin.

En effet, une émotion agréable indique un besoin satisfait. Quant à l’émotion désagréable (comme la colère, qui nous intéresse davantage), elle exprime un besoin NON satisfait. À travers mes ateliers et mes précédents articles, je vous ai également conseillé d’identifier le besoin non satisfait de votre enfant… et bien, bonne nouvelle ! Ça vaut aussi pour vous !

Vous êtes en colère. Comment identifier le besoin non satisfait derrière cette émotion ? La situation qui la déclenche peut vous aider à trouver des éléments de réponse. Quelques exemples :

  • Votre enfant hurle : Vous avez peut-être besoin de calme ?
  • Votre enfant SEMBLE ne pas vous écouter : vous avez peut-être besoin d’écoute ?
  • Votre enfant vous tape, ou fait mal à un autre : Vous avez peut-être besoin de sécurité, ou d’avoir confiance (en les autres, donc en vous) ?
  • Il est 19 heures, et vous faites face à un énième conflit : Vous avez peut-être simplement faim ou besoin de repos (sommeil) ?

Quelque soit la situation, votre émotion vous indique que l’un (ou plusieurs) de vos besoins n’est pas comblé. Voici une liste non-exhaustive des besoins non satisfaits que vous pourriez ressentir : besoins physiologiques (faim, sommeil, hygiène), besoin d’écoute, de reconnaissance, d’amour, de sécurité (physique et affective), de soutien, d’honnêteté, de silence/calme, d’intimité, d’espace, de jeu, de respect… il y en a bien d’autres…

Tentez de vous poser 2 minutes pour réfléchir au besoin non satisfait caché derrière votre colère que peut, malgré lui, déclencher votre enfant. Soyez honnête avec vous même, ça ne coûte rien.Une fois que vous avez une idée du besoin non satisfait, il suffit trouver des solutions pour que celui-ci soit comblé. C’est là que les choses se gâtent : je précise souvent, lorsqu’il s’agit des enfants, que nous devons combler leurs besoins (exprimé eux aussi par une émotion). Seulement, l’inverse n’est pas vrai ! Ce N’est PAS à votre enfant de combler les vôtres. Nous le faisons pour eux car ils sont dépendants de nous.

INSTANT DÉVELOPPEMENT PERSONNEL : Comment pouvez-vous vous même combler vos besoins ?Vous seul(e) pouvez combler votre besoin. Reprenez chaque besoin non satisfait que vous ressentez et essayer de trouver une solution pour le combler. Posez-vous la question : Qu’est ce que je peux mettre en place pour combler ce besoin? Je ne vous donnerai pas de réponse, car chaque personne a des besoins différents, des vies différentes, dans des contextes différents. Une solution peut convenir à une personne mais pas une autre. C’est pourquoi, c’est à vous de trouver VOTRE solution.

Quelques exemples néanmoins pour que vous compreniez bien la réflexion à entamer :

-> J’ai besoin de calme. Comment pourrais-je trouver le calme (intérieur) ? Par des balades en forêt ? Par la méditation ? Par un bon bain ?

-> J’ai besoin d’écoute : Y a t-il des situations dans lesquelles je ne me suis pas écouté(e) ? Mon corps me fait il comprendre des choses, par des douleurs que je n’ai pas prises en compte ?

-> J’ai besoin de me sentir respecté(e) : Est-ce que je me respecte moi-même ? Est-ce que je respecte mon corps ? Est-ce que je respecte mes valeurs ? Est-ce que je me respecte en tant que personne (la petite voix qui me juge me dit quoi) ?

Vous l’aurez compris, vos besoins non satisfaits sont liés à votre bien-être intérieur.

 

5- Souvenez- vous que votre enfant est en pleine maturation…

… et qu’il a besoin de vous pour apprendre à gérer ses émotions. Mais pour cela, il vous faudra apprendre à gérer les vôtres.

De jour en jour, votre enfant fait des expériences (qui vous plaisent plus ou moins), il s’affirme, il s’exprime, il se positionne en tant que personne… Cela peut nous irriter mais il est simplement de grandir !Alors rappelez vous seulement ce fait : votre enfant grandit, et ce, grâce AUSSI aux situations de conflit que vous rencontrez. Il apprend également lorsque vous êtes en colère ! Alors, une fois la colère passée, essayer de le regarder avec compréhension puisqu’il est en pleine construction.

Pour conclure, la colère que vous pouvez parfois ressentir est légitime, et vous permet de mettre en lumière quelque chose qui ne va pas. Elle ne doit pas vous culpabiliser, mais vous permettre de comprendre le problème et réfléchir aux solutions que vous pouvez trouver à celui-ci. Nos émotions nous sont particulièrement utiles au quotidien, encore faut-il les prendre en compte !

 

Anne-Claire BROSSET – À Cœur Bienveillant